L’homme qui ment, Marc Lavoine, Fayard, 17 euros, 190 pages
Communiste et charmeur, cégétiste et volage : tel était Lulu, mon père. Menteur aussi, un peu, beaucoup, passionnément, pour couvrir ses frasques, mais aussi pour rendre la vie plus belle et inattendue.
Lulu avait toujours une grève à organiser ou des affiches à placarder. La nuit venue, il nous embrigadait, ma mère, mon frère et moi, et nous l’aurions suivi au bout du monde en trimballant nos seaux de colle et nos pinceaux. Il nous faisait partager ses rêves, nous étions unis, nous étions heureux.
Evidemment, un jour, les lendemains qui chantent sont réduits à l’achat d’une nouvelle voiture, et Che Guevarra a fin imprimé sur un tee-shirt.
Le clan allait-il survivre à l’érosion de son idéal et aux aventures amoureuses que Lulu avait de plus en plus de mal à cacher ? Collègues, voisines, amie ; brunes, blondes, rousses : ses goûts étaient éclectiques. Lulu était très ouvert d’esprit.
Sans nous en rendre compte, nous avions dansé sur un volcan. L’éruption était inévitable.
Cri d’amour pour un père disparu, voilà ce qu’est ce récit, car il ne s’agit ni d’un roman, ni d’une autobiographie. Au fil des pages, l’auteur égraine des morceaux de vie qui éclairent progressivement les différentes facettes de sa famille. Des parents qui s’aiment malgré un père particulièrement volage. Ses incartades s’apparentent presque à une pathologie : il est dans l’incapacité de résister à un jupon qui passe d’autant plus qu’on est en plein dans l’époque reine de la mini-jupe ! Pourtant Lulu est attachant. Il n’a rien d’un pervers. Il faut dire qu’il est décrit à travers le prisme de l’amour filial. De l’amour il y en a dans cette famille. Ça transpire à chaque page. C’est ce qui la sauve en quelque sorte, même quand tout vole en éclat…
C’est le récit d’un fils qui fait revivre son père disparu le temps de quelques pages. La mort est présente. Le texte organisé en chapitres très courts, ramassés, s’articule autour du décès de ce père atypique. Il commence et se termine dans le cimetière de Wissous, une structure cyclique qui donne l’effet d’une tombe qu’on referme, une parenthèse qui se clôt.
L’éditeur a salué la naissance d’un écrivain. Je n’irai pas jusque-là. Même si Marc Lavoine a incontestablement un style, mais son écriture sur une histoire très intime vient de ses tripes. Qui sait ce qu’il donnerait sur un autre sujet, plus distancié de sa propre histoire ? Ça, l’avenir nous le dira… ou pas.